Vieille Branche [PV India Winchester]

« Vous avez 8 rendez-vous aujourd’hui. » il but une gorgée de son café bien fort tout en retenant un soupir agacé. Huit rendez-vous… Ca voulait dire que sa journée entière serait passée assise à un bureau à essayer de ne pas avoir l’air trop emmerdé par les personnes en face de lui… Super… « C’est qui les premiers ? » histoire qu’il sache s’il devait cacher un magazine entre les pages d’un dossier factice. Il avait vu quelques tests psychologiques dans une des lectures de Pepper qu’il aurait bien aimé faire vite fait… « Il y a un journaliste du magazine Science et Avenir, une représentante du bureau du maire et une personne du nom d’India Winchester. » Tony s’arrêta un instant alors qu’il buvait une seconde gorgée. « Les civils peuvent prendre rendez-vous ? » demanda-t-il avant que Friday ne réponde « Elle avait votre carte de visite… » même s’il n’avait programmé qu’un sarcasme assez léger pour Friday, il pouvait sentir le jugement découler de son ton… Ou alors c’était simplement lui-même qui ressentait un vague sentiment de honte à ce que cela signifiait. S’il ne se souvenait pas de son nom, c’était certainement qu’il avait été alcoolisé au moment de lui donner sa carte… Ce qui voulait dire, à en juger par le nom féminin de la personne, qu’il y avait deux chances sur trois qu’elle se soit retrouvée dans son lit.

Il se passa une main sur le visage et tapota son bureau de l’autre main avant de dire « Décale India Winchester en premier rendez-vous. » ça allait l’emmerder de ne pas savoir ce qu’elle voulait. Et surtout, il n’avait aucune envie de voir un journaliste ou un politicien maintenant. Avec les manifestations en cours, ils allaient encore lui demander son avis et il en avait marre de dire « Sans commentaire » sans cesse ces jours-ci. Il aimerait bien juste les remballer, mais Pepper lui avait dit d’être plus diplomate. Comme il n’avait envie d’être aucun effort pour être imaginatif de ce côté-là, il se contentait de ne rien dire.

Puis il sortit pour se diriger vers le bâtiment de réception. Si le complexe des Avengers possédait pas mal de bâtiment, il n’y en avait qu’un seul qui recevait les gens extérieurs à l’organisation. C’était là-bas qu’il y avait la salle de conférence, les bureaux pour discuter et recevoir du gratin et aussi pour gérer les médias et les visiteurs curieux. Tony entra dans son bureau attitré et se refit une tasse de café avec sa machine. Il priait pour que cette India ne soit pas venue lui hurler dessus ou lui présenter un enfant qu’il n’avait jamais connu…

Tony ne s’attendait pas vraiment à ça. La jeune femme entre dans le bureau, canne à la main et apparemment légèrement boiteuse. Puis, le visage lui rappelle quelque chose. Il se revoit, des années et des années en arrière, dans une soirée, alcool, possiblement drogues, des gens qui dansent… Il se souvenait de bribes de son visage, mais il se souvient surtout qu’ils s’étaient fréquentés fut un temps. Si sa mémoire était bonne, il lui semblait qu’elle était du genre pas très délicate et plutôt directe. Et ça ne manqua pas. Le reconnaissant (en même temps il était difficile de ne pas le connaître), elle rentre directement dans le vif du sujet et lui demande… Une nouvelle jambe.

Tony reste interdit quelques secondes avant que ses yeux ne se posent sur ses jambes et se souvienne qu’elle avait perdu une jambe… D’où le boitement et la canne. Il était d’habitude plus réactif que ça, mais l’embourbement dans ses souvenirs lui avait fait un peu perdre pied. Il se redresse sur son bureau et finit par se lever pour tendre sa main.

« Ahhh India… Oui… On s’était rencontré à… Oui… » dit-il vaguement comme pour prétendre qu’il se souvenait parfaitement d’elle comme elle se souvenait de lui. Il n’avait pas envie de rentrer dans les détails de son addiction, de son passé peu glorieux et de son ancienne personnalité bien moins responsable. Il eut soudainement envie de lui demander s’ils avaient utilisé un préservatif mais sa conscience lui murmura que c’était possiblement trop tôt et trop inapproprié. « Une jambe… Dans le genre de mon armure, avec les lasers tueurs en moins ? Tu penses que ton assurance couvre ce genre de choses ? » demanda-t-il ironiquement. Il avait déjà essayé de designer des prothèses spécialisées et avait eu quelques idées en tête, mais comme beaucoup de ses projets, ils étaient resté au stade de croquis perdus au milieu de son laboratoire.

Elle soupira, comme si elle arrivait à voir à travers lui. Elle rigola et ajouta qu’elle voudrait bien des petits gadgets. Tony l’observait, cherchant sa mémoire pour le moindre petit détail qui pourrait lui rappeler quelque chose de significatif. Elle s’installa et Tony passa derrière le bureau pour s’installer à son tour. Et puis, finalement, elle mit les deux pieds dedans et lui demanda si elle était si facile à oublier. Se passant une main sur le visage, il soupire à son tour. Il avait vécu et revécu cette scène assez de fois pour savoir qu’il décevait assez de gens comme ça.

« Tu sais… Je ne me souviens plus de ce que j’ai fait hier. Et pourtant, je suis sûre que ça concerne la sécurité entière du pays ou truc du genre. » dit-il en agitant sa main pour symboliser le « truc du genre ». « Et il faut dire qu’à l’époque j’avais pas forcément l’esprit très clair même si je suis sûre que pour coucher avec des femmes j’avais l’air très précis et motivé… » dit-il avec un petit sourire en coin, désolé et en même temps un peu amusé. Des fois, quand il repensait à sa vie d’avant, il avait du mal à se dire qu’il avait autant évoluer. Comment avait-il réussi à être heureux ? Ou alors se pensait-il heureux à cause d’un dénis très puissant ? Il n’était pas très sûr.

« Mais je me souviens de toi en fait. Je me souviens qu’on traînait ensemble en plus de passer sous les draps. Ca je me souviens car je l’ai pas fait souvent. » pointa-t-il du doigt. D’habitude Jarvis montrait la porte de sortie aux jeunes femmes qui passaient dans son lit et il ne les revoyait plus jamais, sauf dans certains réceptions où on lui balançait des verres de champagne à plusieurs centaines de dollars à la tête. « M’enfin… Je pourrais aussi me sentir insulté que tu me prennes pour ton fournisseur de prothèses… Non pas que je ne sympathise pas avec ta condition, mais bon, d’habitude on prétend être les meilleurs amis du monde avant de vouloir me soutirer de l’argent ou des technologies. » conclue-t-il avec un petit sourire. Est-ce que ça le dérangeait ? Pas vraiment. Il était tellement habitué qu’il avait finit par vivre avec.

India lui répondit du tac au tac avec sa manière toujours aussi directe de dire les choses. Tony préférait largement les personnes comme ça. Même si, souvent, les politiciens et les gens qui tournaient autour du pot étaient faciles à lire, l’homme préférait qu’on lui facilite la tâche et qu’on lui dise directement ce qu’on lui voulait. Des fois c’était presque amusant de secouer sous le nez des gens leurs mensonges ou leurs déformations de la réalité. Tony n’était pas le genre à faire plaisir par principe. S’il le pouvait, il ferait mariner les autres dans leur propre honte avant de passer à autre chose. Attitude qu’il n’appréciait pas quand on la retournait contre lui… Mais ça faisait partie de ses vices.

Lorsqu’elle mentionna le fait qu’il semblait avoir réussi à se stabiliser, ses sourcils se relevèrent légèrement. Stabiliser, c’était donc le mot qui lui correspondait… Etait-il instable avant de rencontrer Pepper ?

« Je te taquine India. Moi aussi je me souviens des bons moments tu sais, mais il y en avait aussi pas mal embrumés dans de l’alcool… » et possiblement des drogues mais justement, il ne se souvenait pas plus que ça. Puis elle sortit un carnet de dessin qu’elle posa sur le bureau. Il se souvenait de certains mais d’autres lui semblaient inconnus.

« Ah oui je me souviens, je me refaisais un marathon Star Wars à l’époque, ça devait être ça… » dit-il en prenant le carnet entre ses mains. « Je peux le faire bien entendu. Je me méfis souvent des vieilles têtes qui semblent resurgir du passé, déformation professionnelle je suppose… » il regardait les croquis et commençait à se rappeler de certains modèles. « Tu aurais tes mesures encore ? Et tu cherches quelque chose de spécifique ? Ou simplement une prothèse de marche avec une poche pour tes clés ? » Avec les dernières évolution il était potentiellement envisageable de créer des systèmes de défense ou des gadgets pour faciliter la marche…

« Ahlala j’avais oublié que tu avais vraiment des goûts de chiottes pour ne pas aimer Star Wars… » dit-il avec un sourire. Non seulement elle n’aimait pas, mais elle était convaincue que personne ne pouvait aimer ces films. Tony, lui, ne comprenait pas. Pour lui, c’était les meilleurs films du cinéma Américain en plus d’être très divertissants. Il se faisait souvent un petit marathon pour se replonger dans son enfance et aussi éviter de trop penser aux divers problèmes qui l’étouffaient quelques fois.

Il prit le papier avec les mesures et hocha la tête alors qu’elle lui expliquait qu’elle s’attendait quand même à des surprises, le connaissant. Il acquiesça « Ouai, je verrais ce que je peux faire. Je t’enverrais des croquis sur ton adresse email et tu me diras. Me connaissant, je vais avoir trop d’idées et je vais pas réussir à me décider… » il fit une pause et demanda « Violet foncé pour la couleur ? Ou je te mets une petite gamme de coques de plusieurs couleurs histoire de pouvoir coordonner ta jambe avec tes tenues ? » il était carrément du genre à faire attention à son apparence, mais il savait que India était bien moins précieuse que lui. Après tout, ils n’avaient pas été élevés pareils et n’avaient pas non plus eu les mêmes vies et les mêmes priorités.

Puis elle mentionna son travail avec l’Avengers Academy. « Houla non ! » dit-il en levant les bras « Par pitié non, je ne m’en occupe pas… J’ai déjà assez à faire avec les autres Avengers, j’ai pas envie de m’occuper des gamins à la morve au nez… » même si il en avait une de gamine avec la morve au nez, à la maison, mais elle c’était différent… « Je leur donne de l’argent, je vais chercher des bons profs et je leur donne des jolis dortoirs. Et après… Les profs essayent de les empêcher de tout détruire. C’est pas grand-chose… » commenta-t-il en jetant un coup d’œil par la fenêtre. Au loin, on pouvait voir les bâtiment du campus dépasser au-delà d’une ligne d’arbres. « Et toi ? Tu fais quoi maintenant ? » India était du genre à tout lâcher du jour au lendemain pour changer de direction, elle pouvait très bien être au même point qu’acrobate dans un cirque…

La jeune femme semblait enthousiaste à l’idée d’une coque personnalisable. Il sourit alors que déjà des idées s’esquissaient dans son esprit. Il voyait des lumières en led, changeants de couleur. Il hocha la tête « Oui je me souviens de ce genre de détails maintenant… » dit-il. Il y a longtemps il se serait plus ou moins souvenu des nuits torrides qu’ils avaient vécues et de bribes de conversations souvent autour de la technologie… Pepper lui avait appris à faire attention à ce genre de détails et pas mal de personnes s’étonnaient de voir Tony bien plus attentif qu’avant. Sa vie de sobriété aidait pas mal aussi.

India mentionna ensuite le fait qu’il pourrait peut être être papa. La pensée le fit presque pouffer de rire et de surprise. « Papa ?... Vu celui que j’avais de père, je pense queje ne suis pas pressé de réitérer l’expérience, surtout si c’est moi qui doit avoir le mauvais rôle. » commenta-t-il. Il savait que son père avait eu énormément de problèmes et de responsabilités qui ont certainement provoqué la distance qui les avait séparés, mais il y avait des blessures que Tony avait du mal à refermer. Même en étant un adulte maintenant et même en comprenant certaines choses. « Enfin… avec Pepper on garde une gamine. Mais elle est grande, elle sait se débrouiller toute seule donc ça va, j’ai pas de couches à changer et de nez plein de morve à moucher. » dit-il. Zoe avait beau être mature, elle était aussi jeune et très têtue. Deux choses qui pouvaient faire des ravages une fois ensemble, et il en savait quelque chose. Dans sa prime jeunesse, avec sa grande gueule et son envie de tout renverser dans le monde, il en avait fait des conneries.

India mentionna sa vie, qui ressemblait sensiblement à celle qu’il avait connu à l’époque. « Depuis que j’ai arrêté, je me porte mieux personnellement. » Cela ne voulait pas dire que c’était facile ou même agréable. Il y avait eu énormément d’occasions où il aurait aimé se saouler et tout oublier plutôt que d’assumer ses responsabilités. Il lui arrivait aussi des fois d’avoir des envies très fortes, presque aliénantes… Mais ça, personne n’avait besoin de le savoir. Puis, India lui avoua qu’elle aimerait bien qu’ils se voient plus souvent.

« Pourquoi pas… Après tout, je compte rester dans le coin, et il faudra bien faire plusieurs essayages de ta prothèse avant de finaliser. A moins que des aliens ne décident d’envahir la planète encore une fois, je crois que je serais disponible pour sortir de temps en temps ! » dit-il avec un sourire alors qu’un nœud se nouait dans son estomac. Il avait beau en rire régulièrement, l’idée que des aliens se pointent sur Terre comme des fleurs le terrorisait à chaque fois.